jeudi 8 juillet 2010

une leçon de calcul

Acte unique

Dans les mangroves au bord d’un fleuve tropical, une femme pêche à la ligne. Soudain une voiture gare dans les environs. Une femme riche sort en cascade de la voiture et court vers le fleuve comme pour s’y jeter. Une pensée la retient. La pêcheuse se cache pour ne pas être vu. Les clés de la voiture sont jetées dans l’eau. La riche femme sort de son sac à main une corde qu’elle fixe à un arbre au bord du fleuve….

Marthe : le corps ne va plus dans mes vêtements ! Impossible de comprendre ce malaise. Le contenir, jamais. Albert avait juré de n’aimer que moi. Toute la vie. Et moi aussi j’ai fait ce serment. Tu trompes qui Albert ? Avec qui ? Le mal. Il n’a pas le droit. Tout se couvre d’un nuage épais. Rupture. J’ai détruit la réputation de mon père pour suivre l’impasse. J’ai trahi mes parents mes frères ; sacrifiant ainsi ma jeunesse pour une liaison communautaire. Le con. Il a une maîtresse. Depuis longtemps il a une maîtresse. La honte. Je ne sais pas supporter. Le mal de vivre. Je ne peux pas. J’ai décidé de mourir. On peut décider de mourir Albert. Aujourd’hui. Albert, Je suis décidée Albert! Marthe tu ne peux pas vivre ça. L’horreur ! Je veux tout ou rien. Mon amour est pur.
Avec mes enfants je ne peux pas supporter de vivre la honte. L’humiliation. C’est fini ! Albert C’est fini c’est la fin je n’en peux plus. Jamais Albert ! La fin.
(Elle essaye de faire un nœud, monte sur l’arbre et s’aperçoit d’en haut qu’une femme la regarde.)
Eh ! Femme des mangroves s’il te plaît passe ton chemin.

La pauvre : ici est mon chemin. Tu es la manne que m’envoie le ciel je saurai patienter pour que tu m’appartiennes.

Marthe : vous mangez la chair humaine ? Au vingt et unième siècle ? Allez-vous-en !

La pauvre : ce n’est pas ce que tu as entendu.

Marthe : je ne suis pas idiote !

La pauvre : ce n’est pas ce que tu laisses comprendre. Au vingt et unième siècle. Continue ta bêtise elle profite aux autres.

Marthe : tu n’es qu’une insensée ! Que fait cette insensée sur mon chemin ?

La pauvre : pas aussi insensée que toi. Continue ta tâche. Mets fin à ta vie. Aujourd’hui est ton dernier jour ! Le Dernier jour de Marthe.

Marthe : tu n’as pas d’observation à me faire. Quel est ce malheur qui se place sur mon chemin. Je te dois ? Ma vie ne concerne que moi.

La pauvre : ce que tu dis est clair femme des hauts milieux. C’est la raison pour laquelle j’attends. J’espère seulement que tu ne me feras pas attendre longtemps.

Marthe : tu attendras une éternité. Mangeuse d’homme ! Je suis une viande amère une peste pour les tiens. Misérable femme.

La pauvre : tu n’es une peste que pour toi. Pour la société. Meurs tranquille sans maudire le monde. Névrosée de la société. Meurs !

Marthe : (descendant de l’arbre.) Moi névrosée ? Qu’est-ce que la misère attend pour vous supprimer de la terre ? Névrosée Marthe. Tu ne penses tout de même pas que je vais essuyer cette injure.

La pauvre : tu vas le faire et de la plus belle manière. Pour qui te prends-tu pour te donner le droit de supprimer une vie ?

Marthe : c’est ma vie ! L’idiote… elle me pose des questions. Est-ce que tu peux comprendre que je fais de ma vie ce que je veux ?

La pauvre : as-tu le droit de la supprimer ?

Marthe : as-tu le droit de m’en empêcher ?

La pauvre : pose-toi cette question !

Marthe : réponds à cette question !

La pauvre : non ! J’attends ! C’est une chose que je sais faire de mieux en mieux. Attendre. Ma récompense est dans l’attente. Aujourd’hui c’est ton dernier jour ! Le calcul est bien fait.

Marthe : quel calcul ? Va calculer les vies ailleurs. Ce n’est pas toi qui décides de mon dernier jour.

La pauvre : arrête de perdre ton temps et le mien. Tu es au bord de la vie Marthe. Au bord de ton temps entièrement au bord. Ta fin m’intéresse.

Marthe : qu’est-ce que tu sais toi ?

La pauvre : rien ! A part que mon mari est libre. Je ne regarde pas la vie à la télévision. Je la vis à la seconde près. Quelle que soit la démence d’un con, je ne peux pas me tuer à cause de lui. Ni même pour lui.

Marthe : tu n’as pas connu l’amour. Ça se voit que tu ne sais pas ce que c’est que l’amour.

La pauvre : l’amour ! C’est un mot. Un conte. Une histoire où la fin dépend du héros. Dans un couple ici, l’homme joue le héros et pour lui, la femme est un accessoire.

Marthe : vous êtes primitif ! Je refuse de rester accessoire dans mon histoire.

La pauvre : c’est pour cette raison que ton histoire ne va pas exister.

Marthe : pourquoi ?

La pauvre : puisqu’il n’y a pas d’accessoire pour le héros.

Marthe : je ne suis pas un accessoire. Je suis mariée depuis douze ans.

La pauvre : ça ne veut rien dire. Nous sommes primitifs au suicide. Douze ans passent assez vite.

Marthe : mon mari est le héros de mon histoire.

La pauvre : C’est faux ! C’est le héros de l’histoire d’une autre. Tu es figurante. L’indésirable figurante. On ne choisit pas de sortir de son histoire.

Marthe : où est ma liberté ? J’ai honte des cornes. Mon mari m’a trahi.

La pauvre : rectifie la signification que tu donnes au verbe trahir. Si je le prends dans ton sens, l’homme n’a jamais fait autre chose que trahir. Il se trahit et tu ne dois pas te sentir victime.

Marthe : ah non ! Le mien ne vient que de le faire.

La pauvre : faux ! Il ne vient que de te le faire savoir.

Marthe : il ne sait même pas que je sais.

La pauvre : faux ! Je vois que tu as encore plein de choses à apprendre. C’est pourquoi aujourd’hui doit être ton dernier jour. Meurs s’il te plaît. Ton mari sait très exactement ce que tu es en train de faire. C’est le pire qui lui échappe.

Marthe : ne crois pas que tu détiens la vérité. Tu crois tout savoir ?

La pauvre : même pas ! Je ne vois pas la télé avec toutes ces séries pleines de quiproquos et malentendus. La vie n’est que ça. Mon mari a six femmes. Ça ne l’empêche pas de montrer son insatiabilité. Je ne sais pas avoir déjà rencontré d’homme aussi fier que lui. Il se fout de ce que je pense, de ce que je porte comme robe ou bijoux. Même de ma fierté à moi. Depuis des années, mon repas n’est constitué que du poisson que je pêche moi-même et pourtant, j’adore la vie. Tu ne peux pas savoir ce que penser à moi me fait gagner. Je suis satisfaite moi c’est à lui que quelque chose manque. Ma fierté personne ne peut me la voler même pas la misère.

Marthe : que tu es idiote de croire que le bonheur c’est dans l’abondance. En amour la trahison est cruelle et pire encore elle pousse au suicide.

La pauvre : je comprends d’où vient ton ignorance. Ton mari t’a longtemps fait croire que tu es le soleil de sa vie. Tu l’as cru. Il t’a dit que sa vie s’arrêterait sans toi. Tu l’as cru. Pendant longtemps il t’a dit qu’il était fou de toi. De ton amour pour lui. Tout bêtement tu as avalé ça. Tu l’as cru. Tu as cru à l’amour. De qui ? Regarde bien là où il te mène. C’est ça l’histoire d’une série de télévision. C’est le traître qui doit mourir pas la victime. Mourir c’est aussi une façon de trahir. Suicide-toi. J’attends de profiter de ton amour.

Marthe : les pauvres ne savent rien de l’amour. Mon mari m’aimait. Jusqu’à ce que cette misérable femme ne vienne changer les choses.

La pauvre : la pauvreté n’a rien à voir avec l’amour. L’ignorance croit que l’amour est éternel. Tout ce qui commence peut finir. Ton malheur vient de tes yeux. Il faut souvent refuser de voir certaines vérités. Ton mari t’aime toujours j’en suis sûre. Ton suicide lui fera beaucoup de peine. Et la vie va continuer. Avec douleur mais tout doucement le temps efface la peine.

Marthe : et sa maîtresse ?

La pauvre : aimer n’est pas mourir. Nous autres pauvres, apprenons très vite les choses. La vérité est de notre quotidien. Quand nous n’avons rien à manger, nous causons. Chacun parle de ses rapports avec la vie. Tout le monde se mûrit de l’expérience des autres. Vous les gens bien, vous savez vous taire. Justement parce que vous croyez que la vérité se trouve dans les livres.

Marthe : c’est ce que vous croyez vous aussi !

La pauvre : non ! La parole des livres ne respire pas. Nous savons que l’amour est une pioche qui creuse les cœurs. C’est après moi que mon mari a eu cinq autres femmes. Je n’ai pas choisi un dernier jour. La pioche me fait de moins en moins mal. Notre mari nous aime toutes. J’ai la certitude. Chacune de nous ne mérite que la place qu’elle a modelée dans le cœur de l’homme. Nous savons aussi qu’il a dans son cœur encore et assez de place pour d’autres femmes. Je ne parlerai pas des maîtresses qui viennent de temps en temps le voir pour ses faveurs viriles. Pour lui voilà l’amour. Nous ne sommes pas obligés lui et moi de voir de la même façon.

Marthe : c’est un animal !

La pauvre : tout homme est animal ! Nous sommes fières que le nôtre exprime son animalité sans hypocrisie. En famille. Nous l’aimons tel qu’il est parce qu’il ne saurait être autrement. Différent. Aimer et s’entendre c’est deux choses. Je plains les femmes comme vous qui pensent qu’on peut atteindre la perfection en trichant. Quand un homme ne triche pas, il fait comme le nôtre.

Marthe : ce raisonnement n’est pas d’aujourd’hui. La femme est l’égale de l’homme.

La pauvre : en droit peut-être pas en devoir. D’ailleurs comment peut-on parler d’égalité quant au niveau de la construction même tout est différent. La femme est la côte de l’homme. La côte ne peut pas égaler la totalité. Je suis prête à parier que ton mari a plus d’une maîtresse ceci depuis le premier jour de tes fiançailles.

Marthe : ce n’est pas vrai ! Qu’est-ce que tu racontes ? N’importe quoi !

La pauvre : tu n’as jamais vu pareille histoire dans vos télés ? il faut toujours exagérer une supposition pour que la vérité soit moins pénible. Ta réaction ne me surprend pas. Tu ne connais pas l’homme. On vous a appris à l’école à n’admettre que ce que vous voyez et lisez. On choisit pour vous ce qui doit être tenu pour vrai et tout le reste est faux. La vérité est impulsive et multiforme. Impossible d’enfermer ses multiples caractéristiques dans le livre. J’imagine mon mari avec cent femmes. S’il n’arrive qu’à vingt, ça me soulage.

Marthe : tu délires déjà ! C’est dans le milieu intellectuel qu’on dit le plus de vérité.

La pauvre : c’est encore vrai pour toi puisque tu fais partie de ce milieu. Mais c’est surtout ce milieu qui s’érige en monde de la vérité. Moi je sais ce que je dis parce que je l’ai vécu. Tous vos maris sont des pseudos polygames ou des pseudos monogames puisque dans l’un ou l’autre des cas on ne peut les classer.

Marthe : d’où te viennent ces informations ?

La pauvre : nos filles sont des secrétaires à vos maris. Elles sont femmes de ménages dans vos foyers. Pour elles, vos maris exemplaires rôdent ici tous les soirs et les week-ends comme des chiens en rut. Pour voir la vérité, pas besoin d’être intellectuelle. Je suis sûre d’avoir déjà vu ta voiture rôdant dans ce coin.

Marthe : quelle voiture ?

La pauvre : celle que tu as garée dans les buissons.

Marthe : tu me suis depuis longtemps.

La pauvre : qu’est ce que tu crois ? Chaque fois qu’une personne étrangère s’approche de notre clan, c’est toujours pour faire quelque chose de spécial.

Marthe : de spécial !

La pauvre : c’est vrai ! Votre monde regorge de beaucoup d’insatiables et d’insatisfaits. Nous sommes la poubelle de vos ombres.

Marthe : dans chaque société il y a des problèmes. Chacun essaie de résoudre à sa façon.

La pauvre : c’est juste. Nos problèmes sont beaucoup liés à la survie. Nous souffrons et ne pensons qu’à ça. Après avoir mangé, nous dormons pour avoir suffisamment de force pour le combat de demain. Voilà notre préoccupation.

Marthe : nos préoccupations ne sont pas loin des vôtres.

La pauvre : tu parles ! Vous n’avez plus faim. C’est la domination du monde et du prochain qui vous préoccupe. Vous voulez être au-dessus de tout.

Marthe : c’est sinistre ! Qu’est ce qui vous fait penser tant de chose à notre sujet ?

La pauvre : ne fais pas la naïve ! Je ne suis pas bête… vous pensez qu’on est nul ici ? Que personne ici ne connaît la couleur du monde ? Nous vous identifions tous. Et comprenons même votre monde plus que vous ne l’imaginiez.
C’est vous qui dirigez le pays. C’est vous qui achetez toutes les bonnes terres. C’est vous qui utilisez les armes, la police, l’armée. C’est vous qui formez vos enfants à la relève. C’est vous qui fixez le prix de tout. Même de nos produits. C’est toujours vous. Vous seuls. D’ailleurs nous resterons toujours soumis à vos multiples pouvoirs d’achat, de vente, de gestion, de raison, politique, culturel… nous recevons chaque jour vos ordures. De la merde d’un homme on peut savoir la conversation de sa table. Vous voulez dominer le monde.

Marthe : c’est le fondement même de l’existence.

La pauvre : comme tu te sens fière de le dire ! Et je suis d’accord avec toi. Ce que je n’admets pas c’est le recours quotidien à l’irrationnel. Même pour les besoins les plus rationnels. Il y a trois jours, un homme a garé ici une Mercedes pour verser des amulettes dans le fleuve. Pendant des heures, il a prononcé des paroles incantatoires. Tout ça pour gagner un marché. C’est ridicule. Hier deux femmes sont venues chacune avec sa grosse voiture. La première à six heures a jeté des œufs dans le fleuve, un cadenas fermé et un petit poussin innocent. La seconde vers midi a sorti deux chiens morts et un chat vivant enfermé dans une cage de la malle de sa voiture. Avant de jeter les cadavres dans le fleuve, elle a enfoncé un clou dans l’oreille droit de chaque chien.

Marthe : c’est horrible !

La pauvre : la première demandait au génie du fleuve de tuer la maîtresse de son mari. La seconde implorait le décès de la femme de son amant.

Marthe : la sorcière !

La pauvre : la chose commune chez ces femmes était le désir sauvage de posséder un homme. Ici chez nous, c’est de la rigolade ! Ici nous devons lutter pour manger. Pour se sentir la pensée indépendante. Quant à l’homme, il vient tout seul et repart comme cela lui plait. Nous nous cultivons pour ça.

Marthe : je ne crois pas à ces histoires.

La pauvre : je ne veux pas te convaincre. Rien n’est vrai chez vous si on ne peut vérifier. La femme qui t’a précédé ce matin enterrait des œufs d’oies pour avoir son mari à elle seule. Elle ne se rend pas compte que je les ai mangés au petit déjeuner ? Ça c’est la vérité. Toi tu es venue avec ta corde parce que tu as décidé de laisser tes enfants et ton mari à ta rivale. Ça aussi c’est la vérité !

Marthe : jamais ! Cette sorcière ne doit pas toucher mes enfants. Qui te donne le droit de prendre cette décision ? Malade !

La pauvre : je ne prends aucune décision. Je suis loin de prendre une décision. Je suis encore à attendre.

Marthe : attendre quoi ?

La pauvre : que tu te suicides pour que je prenne tes habits, tes bijoux et ton sac à main. C’est ça qui nous pousse à vous suivre. Sinon nous ne nous mêlerions jamais de vos affaires.

Marthe : c’est le matériel qui vous intéresse. Je ne me pendrai plus.

La pauvre : ah ! Tu vas te pendre bien obligé. Sans vos poubelles la vie serait plus dure pour nous.

Marthe : viens te pendre à ma place. Je ne me pends plus. Ce n’est pas une obligation.

La pauvre : et moi qu’est ce que je deviens ? La malchance me poursuit depuis le début de cette semaine.

Marthe : tu n’as pas de compassion pour moi ?

La pauvre : quoi ?

Marthe : Quelle est cette façon de se comporter des gens d’ici ?

La pauvre : nous n’avons pas honte de le dire. Nous vivons de vos œufs, de vos chèvres, de vos poulets, de tous vos biens que vous venez abandonner au fleuve pour accomplir vos exigences irrationnelles.

Marthe : vous êtes à plaindre. Un peuple à plaindre.

La pauvre : c’est moi seule qui suis à plaindre. Je serai resté tranquille que tu ne serais pas là à me donner des leçons. J’ai fait un mauvais calcul.

Marthe : tu as une langue de vipère.

La pauvre : parce que je dis la vérité. C’est un défaut mon mari me le dit tout le temps. Te voilà encore victime de la vie par ma faute.

Marthe : Voilà mon sac à main si c’est ça que tu veux. Prends mes bijoux si ça peut te faire du bien mais surtout réjouis-toi d’avoir sauvé une vie. La mienne !

La pauvre : ce n’est pas un mérite de dire la vérité. Le grand mérite est du côté de ceux qui savent l’admettre. Ce que tu me donnes n’ouvrira pas tes yeux si tu refuses de voir. J’ai connu quelqu’un qui ne trouvant pas son bonheur au sud est allé le chercher vers l’ouest. Le suicide c’est la porte sans issue.

Marthe : montre-moi ta case s’il te plaît. Je viendrai souvent te voir avec mes enfants.

La pauvre : regarde.

Marthe : quoi ?

La pauvre : un homme de votre monde.

Marthe : Albert ! Non ce n’est pas vrai !

La pauvre : lui ? C’est qui lui ?

Marthe : c’est Albert bon Dieu je ne suis pas aveugle !

La pauvre : qu’est ce que j’en sais ? Cet homme vient ici tous les vendredis avec une femme.

Marthe : quelle femme ? Je ne suis jamais venue ici.

La pauvre : celle qu’il attend.

Marthe : ok ça ne va pas se passer comme ça. (Elle prend un morceau de bois sec et fonce vers le visiteur)

La pauvre : Il faut savoir comprendre la vie


Bafoussam le 1er juillet 1999

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